UNE JURISPRUDENCE ATTENDUE :

Un arrêt du Conseil d’Etat en date du 26 avril 2018 revient sur la fiscalité des crypto-monnaies et implique des changements plus qu’attendus en la matière ! Jusque-là, leur fiscalité ne reposait que sur la doctrine administrative du Bofip (Bulletin officiel des finances publiques) or, non seulement le Bofip n’a pas valeur de loi et il peut être contesté par le contribuable mais l’assimilation aux seuls BIC/BNC était une aberration. Le juge administratif a donc censuré en partie cette doctrine en considérant que ces sommes renvoient en principe à cette catégorie des plus-values de biens meubles mais que certaines circonstances propres à l’opération de cession peuvent impliquer qu’elles relèvent de dispositions relatives à d’autres catégories de revenus.
Par exemple, les gains provenant de la cession à titre habituel de bitcoins acquis en vue de leur revente dans des conditions caractérisant l’exercice d’une profession commerciale, sont imposables selon le régime des BIC.

ZOOM SUR LE BITCOIN ET LA TVA :

Dans uun arrêt en date du 22 octobre 2015, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé que les opérations de change de la devise virtuelle « bitcoin » contre des devises traditionnelles étaient exonérées de TVA (CJUE, 22 octobre 2015 aff. 264/14 M. David Hedqvist c ;/ Administration fiscale suédoise). La décision du Conseil d’Etat d’avril dernier a éclairci le régime fiscal des crypto-monnaies. Il conviendra d’être attentif aux futures mesures qui devraient en définir encore les contours.

QUEL TAUX D’IMPOSITION S’APPLIQUE AUX CRYPTO-MONNAIES ?

Le taux d’imposition est désormais d’environ 36% (19% de taux fixe + 17,2% de prélèvements sociaux), auxquels peut s’ajouter la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) 4%. Aussi, la progressivité de l’impôt en fonction du revenu ne s’applique plus : 36% pour la grande majorité, 40% pour les assujettis à la CEHR. Enfin, l’abattement est de 5% par an après 2 ans de détention soit une exonération totale au bout de 22 ans.
Néanmoins, la seule certitude que l’on puisse affirmer est que le contribuable ne peut plus se retrancher derrière l’inopposabilité du Bofip. Néanmoins, le Conseil d’Etat n’a pas mis fin aux incertitudes sur de nombreux points.
Ainsi, les profils les plus avantagés sont le petit investisseur et le primo investisseur. En effet, l’article 150 UA ne s’applique pas aux cessions de biens meubles dont le prix est inférieur ou égal à 5000 euros. Autrement dit si le petit investisseur réalise une plus-value inférieure à 5000 euros cette plus-value n’est en principe pas taxée. En outre avec les abattements voire l’exonération totale en fonction de la durée de détention, les primo-investisseurs, ceux ayant acheté des bitcoins avant 2012, bénéficient d’abattements intéressants et, pour les pionniers ayant investi dès 2009, d’une exonération totale en 2021. Bien entendu, ce principe est tempéré par de nombreuses exceptions mais aussi incertitudes.

Bien que ces deux profils semblent assez opposés, les profils les plus désavantagés sont aussi bien la personne à faible revenus et le trader ayant investi des sommes importantes. En effet, le taux d’imposition est le même pour tous, mis à part les assujettis à CEHR. Ce taux s’avère très contraignant si la personne en question a réalisé des plus-values réalisées en 2018.

Le fisc semble désormais faire la distinction entre traders occasionnels et réguliers : sur quelle base détermine-t-il leur nature ? Des traders amateurs ne seront-ils pas amenés à devoir se déclarer en société, avec la complexité que cela implique ? C’est justement toute la problématique du trader actif. En affirmant que seuls les gains occasionnels pouvaient bénéficier des PVBM, l’arrêt du Conseil d’Etat soumet les gains habituels aux BNC ou aux BIC.

ZOOM SUR LE BITCOIN ET LA DECLARATION ISF / IFI :

Pour les personnes qui étaient redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) (devenu Impôt sur la Fortune Immobilière – IFI- depuis le 1er janvier 2018), la valeur des bitcoins entrait dans l’assiette taxable et devraient figurer dans la déclaration annuelle d’ISF. A compter de 2018, la valeur des bitcoins n’entre plus dans l’assiette de l’IFI qui ne taxe que l’immobilier.