Le contexte de crise sanitaire a remis en cause la manière dont les Français conçoivent le logement. Traditionnellement considéré comme un lieu où manger, se laver et dormir, l’habitat est soudain devenu un espace de travail et de cohabitation (ren)forcée. Éternelle source de compromis, le logement français se veut avant tout compact et rentable. Mais de nouveaux critères de bien-être sont apparus en un temps record. Ils posent la question suivante : quel sera l’urbanisme de l’après-Covid ?

Une occasion unique de repenser l’habitat

La profession s’est mobilisée depuis le début du confinement pour amorcer une réflexion sur l’habitat de demain. À titre d’exemple, les membres du bureau du Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA ont organisé des réunions quotidiennes. Ces rendez-vous ont non seulement été l’occasion de prendre des mesures face à la pandémie, mais également de s’interroger sur l’urbanisme de demain.

L’histoire de l’urbanisme a évolué en lien avec la lutte contre les épidémies, depuis l’insalubrité médiévale jusqu’à l’hygiénisme du 21e siècle. Olivier Barbaud, docteur en sciences de gestion, a publié une tribune dans laquelle il évoque les effets potentiels de la pandémie sur le processus d’urbanisation.

« Il est probable que de nouveaux standards d’hygiène s’imposent dans la durée […]. Mais la distanciation sociale se heurtera rapidement à la réalité de l’irréductible promiscuité dans nos mégalopoles. ».

La question se pose donc : comment rendre la vie urbaine plus tolérable entre quatre murs ?

Intégrer des espaces extérieurs dans l’habitat

Pendant longtemps, le citadin a cru pouvoir se passer d’espaces verts. Pourtant, l’enfermement entre quatre murs et les restrictions de circulation ont révélé une frustration très forte. Selon une enquête de l’Obs, 17 % des Parisiens ont quitté la capitale suite à l’annonce du gouvernement. Ils ont ainsi trouvé refuge dans une résidence secondaire ou chez des parents.

Le confinement s’est ainsi révélé un puissant marqueur d’inégalités sociales. Les résidents disposant d’un espace extérieur – balcon, terrasse, jardin – ont eu plus de facilité à accepter l’épreuve. Mais les moins chanceux ont connu une sombre période : conditions insalubres, logement sans fenêtre, surface. Ils sont nombreux dans les zones au marché immobilier et locatif tendu telles que la région parisienne.

L’intégration d’espaces extérieurs et la revalorisation de nos fenêtres devraient donc faire l’objet d’une attention toute particulière ces prochaines années.

Repenser le logement selon l’usager

Les grands ensembles immobiliers sont avant tout pensés en termes techniques : les salles de bains doivent être situées les unes au-dessus des autres, les gaines doivent communiquer, etc. Cette manière de concevoir l’architecture place la simplicité technique et les process traditionnels devant la notion d’usage. Cela contribue à diminuer considérablement les possibilités d’aménagement ultérieur.

Or, pour l’architecte Nicolas Ruiz, fondateur de l’agence Studio HNA, cette vision est désormais obsolète et doit être dépassée. Dans une interview passionnante donnée au webzine Neonmag, il explique l’importance de remettre l’usager au centre des projets immobiliers. Sa proposition : rendre les logements plus adaptables aux différents usages. Chaque pièce doit pouvoir revêtir des rôles multiples. Pour cela, les installations doivent être modulables.

« Ça permet non plus de percevoir le logement selon les murs, les réseaux, mais l’usage. Et on se rend compte que beaucoup de choses sont détournées ! ».

Concrètement, concevoir un habitat adaptable implique de sortir de la pensée rigide pour adopter une approche innovante. Créer un accès à l’eau central, qui permettra d’installer la cuisine dans telle ou telle pièce, installer des cloisons amovibles pour changer la disposition des pièces selon les usages… Toutes ces propositions sont accessibles, mais nécessitent un changement de paradigme.

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